" Qu’est-ce que l’amour véritable ? Ni la passion ni la convoitise. C’est bien au-delà. Plus profond et plus large. Cet amour-là consiste à garder constamment à l’esprit ce qui est bon pour celui qu’on aime, ce qui lui est bénéfique, ce qui lui donne le bonheur et la joie… Quand vous aimez quelqu’un, vous ne pouvez espérer qu’il fasse ce qui vous plaît. Cela reviendrait à vous aimer vous-même. Généralement, quand quelqu’un vous dit qu’il vous aime, il vous trompe et se trompe lui-même. Mais celui qui veut devenir un homme véritable doit faire des efforts pour le bien-être des autres, d’abord de ses amis, puis plus tard de son mari ou de sa femme, de ses frères et sœurs, de son père et de sa mère, de ses enfants. Graduellement, il apprendra à aimer tout le monde, il travaillera au bien-être et au bonheur de tous. Cette forme d’amour n’a pas de limite. Il ne s’agit pas de nier l’ego, encore moins de l’humilier, mais de l’élargir. Non pas réprimer le moi mais l’ouvrir. Non le haïr mais le consumer dans un amour plus vaste. Telle est la voie de la Sagesse. Le oui ultime. Ni optimisme ni pessimisme : la lucidité et l’action. Et l’amour véritable qui couronne, aimante et oriente tout. Car la sagesse n’est pas le terme du chemin mais le chemin lui-même. Pour aller où ? Là où vous êtes. Tout est ici et maintenant. Infinie patience, infinie tendresse... "

Svâmi Prajnânpad, Correspondance.

Cité par André Comte-Sponville "De l'autre côté du désespoir", Editions Accarias-L'originel, 2006.