Depuis ce matin, avec quelques jours d’avance (merci Amazon !) mon nouvel ebook est en ligne. Ci-dessous un cinquième et dernier extrait.

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Le présent n’est pas fait pour renier le passé mais pour le relier. Parfois l’accomplir et c’est ce dont témoigne ce livre. Comme les deux fameux Testaments : l’ancien devient obsolète quand le nouveau atteste. Oui, je confirme, le premier garçon était virtuel et volatil ; le second réel et charnel. Le premier fut indifférent, le second bienveillant. Et bienfaisant ! Les mots inventés que « je » jetais autrefois dans le vide par-delà la Méditerranée, aujourd’hui enfin je puis en Ile-de-France les susurrer de vive voix et les déposer sur des lèvres tangibles. Et ces lèvres-ci ne sont pas douces et veloutées parce que l’Auteur entre deux pleurnicheries les a ainsi inventées, à grand renfort d’oxymores ou d’harmonies imitatives, mais tout bonnement parce qu’elles le sont. « C’est ». Ainsi s’opère un exode, un passage salvateur : de l’amour virtuel à l’amour réel, de la fantasmagorie lyrique à l’affection véridique et si possible ludique.

Car si un Maghreb d’opérette a autrefois inoculé le délire et l’obsession nés de la frustration provinciale autant que de la honte indurée, juste avant l’incontournable coming-out, le même Maghreb cette fois acclimaté incarne ici et aujourd’hui la volupté réelle, la jubilation charnelle, l’électrique séduction – émois inédits, nés peut-être d’une autre frustration, qui peut le dire ? d’une attente exacerbée depuis trop d’années… En tout cas, ni hasard ni fatum ni célébration – ne surtout pas retomber dans l’Hymne à l’Amour ! Quant à bêler, plutôt le roman de gare. Ou, mieux encore, le strict compte rendu texto après texto. C’est, on l’a vu, moins pompeux et tellement plus drôle ! Car, même prosaïque, seul le réel bande quand les mots, eux, se dégonflent comme des capotes flapies. Tout se passe hors texte, hors textos : d’abord la rencontre inopinée, la stupeur, le gosier sec, les regards mouillés, le sexe qui n’est pas sage, et aussi les paroles bredouillées, les silences, les gaffes et les faux-pas, les cadeaux d’amoureux, somptueux ou dérisoires, bonjour ! bonsoir ! mon grand trésor, mon petit chéri, cher gentil, les pouces qui tricotent, le cœur qui s’affole, le sexe qui n’en finit pas de se pousser du col en pleurant son envie… et le long apprivoisement, quelque part entre mes deux livres majeurs : Le Petit Prince et Le petit galopin de nos corps. Car, du moins j’aime à le croire, l’Histoire ne se répète pas (quand moi, je rabâche) : elle s’accomplit. La mienne, la sienne, la nôtre j’espère. Avec l’inévitable et facétieux clin d’œil : de Tanger à Tanger… Aller-retour. Retour à la case départ ou bien cercle bouclé ?

Le texte qui va suivre – tel que l’actualité amoureuse le restaure autant qu’elle le restitue – fut en réalité un ensevelissement, presque un avis de décès. Et en même temps, ô paradoxe, mon véritable décollage littéraire : Prix Vedrarias 2002. Bravissimo ! Tout ça pour ça, ai-je envie d’écrire aujourd’hui. Passons. D’abord griffonnée fiévreusement dans le TGV à la fin du siècle dernier, cette missive fut ensuite réécrite sous la forme d’une nouvelle primée par la ville de Verrières-le-Buisson avant d’être publiée (“L’Envol” in Le premier Festin, H&O, août 2003). D’autres parutions suivirent ici et là, chaque fois avec des titres différents (Lettre à Rachid, Mon Seigneur et mon Dieu…), aucune ne parvenant à sublimer le texte fondateur ni à expliquer le sauvetage qu’il opéra in extremis. Car ce texte fut d’abord et avant tout un providentiel défibrillateur, il ne faudrait pas que je l’oublie trop vite : avant de consoler, ces mots-là m’ont sauvé.

Mais près de vingt ans plus tard (je parle du tout premier courrier adressé au jeune et surfait auteur Rachid O. après un rendez-vous parisien raté, plus exactement snobé), je n’ai plus besoin de faire appel aux mots, à leur agencement habile, plus envie, plus le temps car des mots, j’ai appris à me méfier. Quand l’attachement prend chair, prend feu, fait lien, même éphémère, en tout cas tangible et enivrant dans la succession des instants fous (instinct de l’instant !), que m’importe sa célébration avec la majuscule – l’Amour – sa survie, sa gloire, ses affres, ses héros ; que pèsent pour nous deux Tristan et Yseult, Le Cid et Chimène, Ariane et Solal, Phèdre et Hyppolite, David et Jonathan… qu’importe même le Commandeur vengeur voire la mythique Odyssée qui vit une reine éplorée se consumer d’ennui et d’espoir au point de détricoter, nuit après nuit, le linceul de sa stoïque vertu !

(…)


Extrait de L@MOUR TEXTO de Michel Bellin ebook/kindle (parution le 28 août 2013 sur Amazon)


Trois mois seulement après “Les amants des praz”, l’auteur, décidément prolifique et plus passionné que jamais, revient à ses amours arc-en-ciel. Cette fois, plus de roman. La pure autofiction. Sous le jeu des mots, le « je » qui palpite. Vertige de l’amour ! L’auteur livre à son lecteur un vécu ardent et suave dont le compte-rendu au jour le jour accomplit un texte fondateur rebaptisé “Tanger à tout prix” (Prix VEDRARIAS). Avec ce diptyque égotiste, Michel Bellin n’a jamais été aussi près du défi qui l’anime depuis “J. L’Apostat” (1996) : écrire sa vie, vivre son écriture. Mais à une seule condition : écrire sa vie littérairement et pas littéralement !