Après 11 mois de mutisme, envie (besoin ?) de jeter à nouveau au quotidien quelques mots sur mon écran… qui les répercutera loin, très loin. Ni raison ni justification. Aucun engagement concernant le contenu ou la durée. Seul le bon plaisir… et l'espoir que plusieurs ici réagiront. Un micro réseau composé des mêmes valeurs, alimenté par les mêmes colères, nourri par de vibrantes émotions et une sorte d'amitié impalpable faufilant la Toile. La seule limite que je m'imposerai : un billet bref (pas plus d'une page avec des marges généreuses).
Ce matin, par ce pluvieux mardi de mai, je m'interroge sur cet étrange lien qui me relie à l'écriture et fausse peut-être ma perception du réel (mais qu'est-ce que le réel ?!). Je viens de lire (dans l'avant-propos des Carnets blancs de Mathieu Simonet, Seuil , 2010 – vrai faux roman dont je n'irai sans doute pas au-delà de la page 42) cette phrase qui me colle à la peau et m'empoisonne délicieusement la vie. Je la tourne et la retourne et je me dis que c'est sans doute à cause – grâce à – d'elle que je reprends mon Journal en ligne. « Je n'arrive jamais à rester dans le “ concret ”. Mon cerveau transforme toujours tout en écriture. Non pas que j'invente. Mais j'ai un rapport distancié au réel. Comme s'il n'était là que pour m'offrir un matériau d'écriture. Dès lors, je ne suis jamais totalement triste face à une dispute amoureuse, à un décès, à une dépression. J'y vois une forme de cadeau, de glaise, dans laquelle je peux dessiner des sculptures. Pour autant, je ne cherche pas à vivre des situations douloureuses pour écrire. J'ai, face au bonheur, le même rapport, la même distance. Je suis comme un schizophrène. D'un côté je suis l'acteur de ma propre vie, de l'autre je suis le photographe de cet acteur. Et c'est dans le corps de ce photographe que je me sens le plus vivant. »
Peut-être est-ce en écrivant à nouveau ce matin, pour moi-même, exclusivement pour toi et pour moi… que je me sens le plus vivant ! Et le plus dépendant. Peux-tu comprendre cette étrange maladie qui est dichotomie ? Et délicieuse addiction…

[Mardi 11 mai 2010]