Morterolles, 1er mars 1999

Ma vie avec Stéphane ressemblait beaucoup au bonheur. Je redoutais d'avoir un jour à en payer le prix. C'est fait. Quand on est pessimiste, on est sûr d'avoir raison finalement.
Depuis trois jours, écrire ce journal ne suffit pas à m'apaiser. Est-ce la lune montante qui me malmène ? Berl croyait à l'influence de la lune. Elle finira bien par redescendre.
Ce que je crois moi, c'est que l'amour est une proposition du diable, il faudrait savoir lui résister. Je suis resté longtemps insensible à ses avances, décidé de ne pas « tomber » amoureux, laissant cela aux jeunes filles perdues d'avance, et puis le diable l'emporte toujours. Souffrir toute la suite de ma vie pour dix-sept ans d'amour fou, la balance penche vraiment trop du mauvais côté…
Il faut rester tranquille, seul : « Quand on poursuit le bonheur, on court après le reflet d'un mot. » Je ne suis pas fait pour les grandes tragédies que sont l'amour et la mort, je suis fait pour la vie et je vois bien pourtant que la vie c'est l'amour et la mort.- Arrête mon petit Jean-Claude, va dire bonjour à tes ânes, ça ira mieux après…
Stéphane savait m'arracher à mes tourments car il ne doutait pas que l'amour vaut d'être vécu. Tu étais le diable mon amour !

Morterolles, 23 juillet

C'est au crépuscule que je m'apaise le mieux. Mes angoisses tombent avec le jour, il y a là un mystère que Dieu seul pourrait expliquer s'il avait le temps de s'intéresser à moi. Je n'y compte pas, on le sait, il a assez à faire avec ses défauts pour ne pas s'embarrasser des mécréants.
Je mourrai un matin qui me surprendra au-delà de mes forces, incapable d'aller plus loin sans Stéphane. D'ici là d'autres sourires viendront peut-être qui me conduiront calmement jusqu'à lui.

Morterolles, 10 novembre

Je n'en peux plus des gens qui parlent, qui parlent pour ne rien dire ou pour médire. Je ne les écoute pas. Je les fuis le plus souvent, certains me poursuivent de leurs assiduités et je cède parfois à leur sincérité provisoire. Je pourrais les mener en bateau, mais ce jeu serait minable.
Suis-je naïf ? Non, pas encore. Alors je me démène pour ne pas céder au découragement. Je m'en veux quand je me trompe.Les traîtres n'ont pas forcément des têtes de traîtres, voilà le problème, avec les traîtresses en revanche c'est plus simple, elles ont à la commissure des lèvres un pli qui les dénonce (même à vingt ans) et dans le regard une fourberie que leur sourire ne dément pas. Stéphane en avait repéré une parmi d'autres autour de moi que je n'avais pas démasquée à son sujet, je la croyais irréprochable.
C'est lui, je le crains, qui avait raison. J'aurai la preuve bientôt qu'elle s'occupe de ce qui ne la regarde pas. Les hommes aussi bavardent, mais ils ne savent pas mentir longtemps.
Je ne suis pas misogyne car il faut le talent de Guitry pour que ce mauvais penchant soit acceptable. Mais c'est vrai, je suis sans indulgence pour celles que leur comportement rend impardonnables. Les misogynes reprochent aux femmes d'être des femmes, moi c'est le contraire qui me scandalise, quand elles renoncent à leur différence.

Extraits de LA VIE SANS LUI, Albin Michel, 2000


Post-scriptum

Dans Ieschoua mon amour (Gap, 2007), j'avais tenu à adresser à Sevran, cible du politiquement correct, ce clin d'œil complice. J'en suis heureux aujourd'hui, surtout à l'heure où Messieurs les Censeurs se sont transformés en cul-bénit noyés dans leurs larmes de caïmans !

« (…) Je sais que je dois pas juger les gens sur la mine, ni sur les voyelles du prénom qui me menace genre Stasi, et j'ai tort d'être raciste envers les cardinaux de l'écurie à Rome. Mais c'est plus fort que moi, un peu comme Pascal Sevran que j'aime bien quand je le vois tout seul devant ma télé le dimanche midi au séminaire où je m'ennuie. On l'a beaucoup taxé comme ça, qu'il est raciste, qu'il aime pas trop les noirs portés sur la chose à cause des malheurs de la planète qui augmentent au bout de leurs zizis et aussi des fusils qu'on leur vend faut bien avouer etc. Je pense qu'on exagère beaucoup pour Sevran qui a des beaux yeux bleu délavé ; moi qui ai beaucoup aimé l'histoire de sida qu'il a racontée – que des extraits mais quand même – c'est trop beau les histoires d'amour qui finissent mal en général, donc un gars qui écrit ça et qui aime tant la musique et la belle chanson d'autrefois et aussi les valses sur le plateau télé avec l'accordéoniste mignon tout plein, bref, c'est clair qu'il peut pas être raciste, surtout après m'avoir fait découvrir le bel Uriel que j'aime en secret parce qu'il a une tête d'archange blond et que sa voix, quand il chante Avec le temps, la chanson préférée de mon écrivain préféré aussi, elle monte, elle monte dans sa voix de tête du haut jusqu'au ciel des larmes qui est sa vraie patrie et aussi la mienne peut-être bientôt si personne ne veut me sauver…

Et pour en revenir à Pascal, plutôt pour continuer dans ma disgression, qu'il aurait dit en plus que l'équipe de France est trop noire aussi, qu'il y a trop de black en short à la queue leu leu, etc. c'est évident ! Y a qu'à voir partout, sur les photos de Paris Match, sur les affiches du RER et même sur la pelouse du Parc des Princes, trop, c'est trop, c'est même pas représentatif et honorable pour eux car les Africains sont pas doués seulement pour les vigiles devant les grands magasins à Paris tout partout et aussi pour le foot national qui est pas non plus très intello comme job rémunératif, même franchement con comme sport surtout à cause des supporters. Donc, je suis d'accord avec Pascal, tout contre avec lui dans l'adversité de la Haute Autorité, et je résiste et signe : le mieux serait que notre équipe s'étale dans les couleurs de la France profonde, en bleu blanc rouge. Seulement, comme c'est pas facile ces couleurs en races mélangées et comme le foot, c'est vraiment trop débile, je m'engage pas davantage, c'est pas mon combat. Je dis seulement que quand on est une vedette, il vaut mieux la fermer ouvertement pour le principe de la précaution sociale même si le Pascal, en fait, il dit en haut ce que tout le monde pense en bas. Et c'est pareil dans les livres, les journaux qu'à la télé. Tu sais jamais que le mot qui t'a échappé, planqué dans un sous-paragraphe, un faux-cul encore plus planqué va le déterrer pour, il dit mon écrivain privé, te le jeter en pâture à la presse. Il vaut donc mieux écrire des recettes de cuisine, ou des poésies, et encore… Mais l'injustice, c'est quand un Grocho de Rome écrit pas un, mais cent propos officiels racistes sur les homos, qu'il en voit partout comme des poux dans la tête ou des poulets qui ont la grippe aviaire, des millions de pauvres petits poulets innocents qu'il faut abattre dans l'urgence. C'est pas injuste ça ? C'est pas fort de nescoré ? C'est pas criminel d'Etat ? Mais la télé en fait pas ses choux gras pour autant, dommage, jamais le temps à cause du couple Ségo-Sarko, dommage bis, car l'Eglise ne rapporte plus rien en fait, n'intéresse personne non plus (sauf l'enterrement médiatique de Subito santo) et que les homosexuels sont trop minoritaires et pas assez médiatiques, eux, sauf pendant leur gay pride honteuse en prime time où ils sont vraiment pas présentables que j'en ai honte deux fois et je le dis franchement comme je pense, à la mode Sevran. »



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