CURE DE POÉSIETHÉRAPIE (15ème leçon)
Par Michel Bellin le vendredi 23 novembre 2007, 07:56 - Lien permanent
Depuis le 3 août dernier, avant chaque week-end et pour une quarantaine de rendez-vous hebdomadaires (si Pouet-Pouet me prête vie !) je propose à mes aficionados une cure de POÉSIETHÉRAPIE selon les recettes éprouvées de Jean-Joseph JULAUD. Un expert ! De quoi aller mieux tout en découvrant ou redécouvrant les plus belles pages de notre Littérature, émollientes ou roboratives suivant le cas. L'idéal – outre les bienfaits pour le mal concerné (migraine, mélancolie, éjaculation précoce, coliques néphrétiques, constipation, insomnie… mal d'amour !), serait d'apprendre par cœur chaque texte puisque la mémoire est un muscle bien trop négligé.
Aujourd'hui – très exceptionnellement – je vole de mes propres ailes et abandonne Julaud. Pour ces temps difficiles (je pense à la grève, au pouvoir d'achat, au froid, au bouffon de l'Elysée…) je suggère un brin de poésie érotique. Ça tombe bien : levés tôt, couchés tard, comprimés et stressés, les « usagers en otage » (vieux slogan UMP) ne sont guère en état de faire l'amour le soir. Les pauvres ! Qu'en est-il des provinciaux ? En tout cas, moi, je me régale : je viens d'hériter de l'œuvre érotique complète de Pierre Louÿs. Quelle merveille ! Et comme je sais gré à mon vieil ami, le cher Père L., de m'avoir légué avant de disparaître le fleuron de sa très éclectique bibliothèque !
C'est franchement polisson et merveilleusement écrit. Avec des ruptures de ton, graveleux ici (ah ! l'enfance innocente, mon œil !), lyrique plus loin. D'autre part, cette littérature exclusivement hétérosexuelle, donc plutôt nouvelle pour moi, est aussi exotique, rafraîchissante et tonique que deux semaines aux Seychelles. Inespéré, non ? Ci-après quelques copieux spécimens, je n'ai pas lésiné : après 10 jours de grève, il faut se requinquer, n'est-ce pas, baiser plus pour vivre plus ! Et pour cela, à l'évidence, rien ne vaut ensuite les travaux pratiques.
Une chose est en tout cas certaine : à ce que j'ai déjà pu en juger, toute l'œuvre érotique de Louÿs semble d'abord être l'expression de sa fascination pour le langage. De là l'irrésistible volupté qu'éprouve l'écrivain non pas tant à décrire certaines scènes qu'à tracer certains mots. Transcription particulièrement volupueuse quand on sait avec quel soin le poète calligraphiait la moindre ligne, de sa splendide écriture violette aux longs jambages et aux belles boucles.
Oui, notre conviction est unanime : le langage parvient à créer ce qu'il représente : verba efficiunt quod significant…
Aujourd'hui – très exceptionnellement – je vole de mes propres ailes et abandonne Julaud. Pour ces temps difficiles (je pense à la grève, au pouvoir d'achat, au froid, au bouffon de l'Elysée…) je suggère un brin de poésie érotique. Ça tombe bien : levés tôt, couchés tard, comprimés et stressés, les « usagers en otage » (vieux slogan UMP) ne sont guère en état de faire l'amour le soir. Les pauvres ! Qu'en est-il des provinciaux ? En tout cas, moi, je me régale : je viens d'hériter de l'œuvre érotique complète de Pierre Louÿs. Quelle merveille ! Et comme je sais gré à mon vieil ami, le cher Père L., de m'avoir légué avant de disparaître le fleuron de sa très éclectique bibliothèque !
C'est franchement polisson et merveilleusement écrit. Avec des ruptures de ton, graveleux ici (ah ! l'enfance innocente, mon œil !), lyrique plus loin. D'autre part, cette littérature exclusivement hétérosexuelle, donc plutôt nouvelle pour moi, est aussi exotique, rafraîchissante et tonique que deux semaines aux Seychelles. Inespéré, non ? Ci-après quelques copieux spécimens, je n'ai pas lésiné : après 10 jours de grève, il faut se requinquer, n'est-ce pas, baiser plus pour vivre plus ! Et pour cela, à l'évidence, rien ne vaut ensuite les travaux pratiques.
Une chose est en tout cas certaine : à ce que j'ai déjà pu en juger, toute l'œuvre érotique de Louÿs semble d'abord être l'expression de sa fascination pour le langage. De là l'irrésistible volupté qu'éprouve l'écrivain non pas tant à décrire certaines scènes qu'à tracer certains mots. Transcription particulièrement volupueuse quand on sait avec quel soin le poète calligraphiait la moindre ligne, de sa splendide écriture violette aux longs jambages et aux belles boucles.
Oui, notre conviction est unanime : le langage parvient à créer ce qu'il représente : verba efficiunt quod significant…
15 – CONTRE L'INAPPÉTENCE SEXUELLE DE NOVEMBRE
XX
Sous la jupe de la danseuse
Je mis le doigt, et constatai
Que son ornière était poisseuse
Et son trou du cul dilaté.
J'ai mis deux doigts, puis trois, puis quatre,
Et mon pouce en l'air par-devant
Sentit bientôt grandir et battre
Son petit bouton si vivant.
(Poésies érotiques)
LE CLITORIS
Blotti sous la tiédeur des nymphes repliées
Comme un pistil de chair dans un lys douloureux
Le Clitoris, corail vivant, cœur ténébreux,
Frémit au souvenir des bouches oubliées.
Toute la Femme vibre et se concentre en lui
C'est la source du rut sous les doigts de la vierge
C'est le pôle éternel où le désir converge
Le paradis du spasme et le Cœur de la Nuit.
Ce qu'il murmure aux flancs, toutes les chairs l'entendent
À ses moindres frissons les mamelles se tendent
Et ses battements sourds mettent le corps en feu.
Ô Clitoris, rubis mystérieux qui bouges
Luisant comme un bijou sur le torse d'un dieu
Dresse-toi, noir de sang, devant les bouches rouges !
La femme (1889-1891)
XXXIX
Quand ell'sentit son cul percé :
« Papa ! papa !
Quell's'écria.
Tu l'as trop gros, tu vas m'blesser !
Dans l'trou du cul
C'est défendu ! »
Et la pauv' petit' chatte
Tremblait su' ses quat' pattes
Et le vieux dégoûtant
La branlait en mêm' temps.
Quand ell' le sentit décharger
« Papa ! papa !
Qu'ell' s'écria.
Tu l'as trop chaud tu vas m'purger
Ah ! vas-y, oui !
V'là que je jouis ! »
Et la sal' petit' chatte
Raidissait les quat' pattes.
Et le vieux dégoûtant
la limait en hal'tant.
Quand elle sentit la pine lâcher
« Papa ! papa !
Qu'ell' s'écria.
Ne la touche pas, laiss'moi lécher
C'est d'mes étrons
Y a rien d'si bon ! »
Et la sal' petit' goule
Tend sa bouche en cul de poule
Et le vieux dégoûtant
Lui met la pin' dedans.
14 février 1896
(LA SOLISTE)
LA NUIT D'AVRIL
(D'après Alfred de Musset)
LA MUSE
Poète, prends ton rut, j'ai besoin de baiser.
La fleur de mes poils noirs s'entrouvre, près d'éclore.
Le printemps naît ce soir, les cons vont s'embraser
Et le doigt de la vierge en attendant l'aurore
Sur la motte en chaleur commence à se poser
Poète, prends mon rut, j'ai besoin de baiser.
LE POÈTE
(En regardant sous la tunique de la muse)
Comme il fait noir dans ta vallée
J'ai cru qu'une chair mal branlée
Brillait là sous ta forêt
Elle sortait de la prairie…
C'est ton clitoris en furie
Qui bande avec ta rêverie
Est-ce bien lui qui m'apparaît ?
LA MUSE
Poète, prends mon rut ; la Nuit sur la pelouse
Berce un godmiché bleu dans son voile odorant.
La vulve, triste encor, se referme jalouse
Sur le vit inconnu qu'elle enivre en pleurant.
Ecoute : on fout partout. Songe à ta bien-aimée.
Ce soir sous les tilleuls, tu la laissas pâmée
Avec un lac de sperme entre les deux genoux.
(Pastiches et parodies)
LA CONFESSION INTERROMPUE
« Ça n'est rien à côté de ce qui m'est arrivé une fois dans l'église de Bougival.
- Dans l'église ?
- Tu vas voir. J'avais onze ans, j'étais au catéchisme. Le curé m'avait dit de venir me confesser un lundi à une heure…A cette heure-là, y a personne dans l'église. Je viens, je me mets à genoux, je dis Je confesse à Dieu Tout-Puissant et tout le boniment, pis je commence à déballer mes petits péchés, que je suçais la pine à tout le monde…
- A onze ans ? tu t'y es pris de bonne heure !
- Quoi, y a pas de mal, j'avais mon pucelage. Alors y me demande si s'aime ça, j'y dis qu'oui. Y demande si j'avale, j'y dis qu'oui. Et tout d'un coup, v'là t'y pas qui passe sa queue par le grillage et qui m'dit : « Montre comment qu'ty fais. »
- Ben, merde, il n'avait pas la trouille.
- Moi, je m'en foutais ; quand j'ai vu la queue, je l'ai gobée. Mais ma chère, si t'avais vu le coup ! V'là t'y pas qu'il bande, qu'il se gonfle, et le grillage était trop étroit ! Il pouvait plus décharger ni retirer sa pine, ni débander, ni rien ! « Ôte ta bouche, qu'il disait, ne suce plus ! » Moi, j'rigolais ! Plus qu'il se tortillait derrière la grille plus que j'pompais par-devant… heureusement pour lui que le grillage était en bois. Il l'a cassé avec ses mains, et alors… ah ! nom de Dieu c'qu'il m'en a pissé dans la bouche ! Moitié foutre et moitié sang !
(Douze douzaine de dialogues)
ACTIONS DE GRACES
Béni soit le Seigneur qui m'a donné dix doigts
Pour que mon clitoris ait le plaisir du choix.
Béni soit le Seigneur qui m'a donné ma bouche
Pour avaler la pine et le foutre farouche.
Béni soit le Seigneur qui m'a donné le con :
Quelle que soit l'ivresse il en est le flacon.
Béni soit le Seigneur qui m'a donné les fesses
Pour que je t'y reçoive et que tu t'y confesses.
Béni soit le Seigneur qui m'a donné l'ardeur
De subir la tribade avecque le bandeur.
Béni soit le Seigneur qui m'a créé infâme
Amoureuse de l'homme et folle de la femme.
Poésies lyriques
Textes extraits de Pierre Louÿs, L'ŒUVRE EROTIQUE, Sortilèges, Les Belles Lettres et J.-J. Pauvert, 1994