COCORICO !
Par Michel Bellin le lundi 8 octobre 2007, 09:38 - Lien permanent
Il paraît que, depuis samedi dernier, nous, les Français, sommes les plus grands, les plus forts, les plus courageux. Ir-ré-sis-ti-bles face aux monstrueux All Blacks. Car, nous répète-t-on à l'envie, la Lumière (personnifiée par Michalak) a triomphé des Tigres noirs et le bon peuple France peut s'esbaubir.
Je vous dois un aveu : je n'ai regardé que les dix dernières minutes de cet historique quart de finale, juste pour m'assurer que tout se déroulait dans le sens de mes vœux : la victoire éclatante des valeureux All Blacks et le triomphe de leur terrrrrrrrrrrrifique haka. Las, comme vous le savez, le sort me fut contraire et on connaît le score : 18-20 pour la France. (J'ai encore quelque espoir pour samedi prochain, comptant bien sur le triomphe de la perfide Albion.)
Mais quoi, me diras-tu ! Bellinus, tu t'intéresses au rugby à présent ? Tu soutiens la Nouvelle-Zélande ? Tu préfères le teigneux McAlister au valeureux Jauzion ? Nenni mon cousin. Mon seul souci : contrer le tsunami patriotique, confirmer l'ancestral diagnostic (Panem et circenses) et me repaître de mon spectacle favori : rien n'est plus jouissif pour moi que lorsque les petits coqs bleu blanc rouge débandent piteusement en remisant leurs étendards et leurs cris de guerre.
Hélas bis, samedi dernier ce fut râpé et le pire arriva : à peine les cris hystériques de mes voisins (papa et les deux garçonnets) s'étaient-ils éteints suite à une défaillance de leurs cordes vocales, à peine les ultimes klaxons avaient-ils disparu dans la Nuit blanche parisienne, les plus folles rumeurs commençaient à circuler : le taux de croissance allait augmenter de 3 points providentiels ; Sarko 1er, sitôt sorti du vestiaire après avoir tâté les pectoraux de Cédric Heymans, promettait en prime time sur TF1 de faire un geste magnanime en amnistiant une centaine de clandestins chinois tandis que Daniel Herrero en personne, éminent chroniqueur du Journal du Dimanche, ambitionnait de marcher dans les traces de notre Hugo national et d'entrer sans tarder sous la Coupole où une place est vacante. Pour preuve, en prélude à son discours d'investiture, ce formidable papier que le lion (barbu) de l'Hyperbole, l'empereur de l'Epopée sportive, le chantre du Lyrisme gaulois vient de commettre, véritable morceau d'anthologie que tout site littéraire digne de ce nom se doit de mettre en ligne in extenso.
Je vous dois un aveu : je n'ai regardé que les dix dernières minutes de cet historique quart de finale, juste pour m'assurer que tout se déroulait dans le sens de mes vœux : la victoire éclatante des valeureux All Blacks et le triomphe de leur terrrrrrrrrrrrifique haka. Las, comme vous le savez, le sort me fut contraire et on connaît le score : 18-20 pour la France. (J'ai encore quelque espoir pour samedi prochain, comptant bien sur le triomphe de la perfide Albion.)
Mais quoi, me diras-tu ! Bellinus, tu t'intéresses au rugby à présent ? Tu soutiens la Nouvelle-Zélande ? Tu préfères le teigneux McAlister au valeureux Jauzion ? Nenni mon cousin. Mon seul souci : contrer le tsunami patriotique, confirmer l'ancestral diagnostic (Panem et circenses) et me repaître de mon spectacle favori : rien n'est plus jouissif pour moi que lorsque les petits coqs bleu blanc rouge débandent piteusement en remisant leurs étendards et leurs cris de guerre.
Hélas bis, samedi dernier ce fut râpé et le pire arriva : à peine les cris hystériques de mes voisins (papa et les deux garçonnets) s'étaient-ils éteints suite à une défaillance de leurs cordes vocales, à peine les ultimes klaxons avaient-ils disparu dans la Nuit blanche parisienne, les plus folles rumeurs commençaient à circuler : le taux de croissance allait augmenter de 3 points providentiels ; Sarko 1er, sitôt sorti du vestiaire après avoir tâté les pectoraux de Cédric Heymans, promettait en prime time sur TF1 de faire un geste magnanime en amnistiant une centaine de clandestins chinois tandis que Daniel Herrero en personne, éminent chroniqueur du Journal du Dimanche, ambitionnait de marcher dans les traces de notre Hugo national et d'entrer sans tarder sous la Coupole où une place est vacante. Pour preuve, en prélude à son discours d'investiture, ce formidable papier que le lion (barbu) de l'Hyperbole, l'empereur de l'Epopée sportive, le chantre du Lyrisme gaulois vient de commettre, véritable morceau d'anthologie que tout site littéraire digne de ce nom se doit de mettre en ligne in extenso.
AU NIRVANA
Au jour J des Coupes du monde, les All Blacks trébuchent toujours. Dramatiquement pour eux, leur rugby plaisant et poli trouve alors son maître : les Boks de 95, rudes et sauvages, les firent douter ; en 99, les Coqs aux crêtes tostéronées, moitié fous et totalement furieux, les firent déjouer.
Les Coqs qui, justement, n'ont jamais cueilli l'étoile : l'eau de Durban en 1995 leur coupa les pattes ; la pluie de 2003, à Sydney, leur colla les neurones. A l'heure du soir qui tombe sur le quart de finale, les Français semblaient décidés à toutes les impolitesses, seule morale à leurs yeux susceptible de transformer leur équipe en saigneurs rebelles, en conquérants de l'impossible. Pour battre les rois noirs sans couronne, il faudrait donc les troubler à cœur de gourdin. A l'heure du haka – beaucoup plus qu'un simulacre d'intimidation – les deux équipes, les yeux dans les yeux, étaient face à leur destin. La première mi-temps ne fut que pitié. Pitié de pieds tordus, de chandelles laides, de diagonales fétides. Les Français, sans foi au jeu de passes, respectaient pourtant avec conscience la sempiternelle loi d'occupation du terrain adverse et celle de la défense sacrificielle pour piller les nids des Kiwis.
Les All Blacks jouèrent cinq petites minutes, le temps donné à McAlister pour déchirer deux fois la ligne bleue et à Dan Carter, indigent, le temps d'engranger ces 13 points qu'on craignait suffisants. Dès la reprise, les AllBlacks, à 14, se mirent à souffrir les mille morts. Dusautoir les poinçonna en hurlant, créant alors le plus hallucinant des espoirs ! Par un jeu de pilonnage apeuré et miséreux, les All Blacks reprennent pourtant l'avantage. Michalak, juste rentré, prend le flambeau de l'offensive. Traille, qui n'avait été qu'une grande sentinelle, s'engouffre dans le plus beau côté fermé du Millenium, et Jauzion, en planche, crucifie les All Blacks désossés. La défense du XV de France encore en feu, devenue nourricière, tord et broie les petits Gris. Pâles, ces All Blacks, bientôt exsangues, débordés, anéantis par le fantôme vampirisant de 99 ressurgi à l'aube de cette seconde mi-temps. Tout autant que le courage viscéral et technicisé de nos Bleus, c'est ce fantôme qui a envoyé encore une fois les All Blacks en enfer et les Bleus au nirvana.
Daniel Herrero
Article paru dans Le Journal du Dimanche du 7 octobre 2007, page 2, « L'événement »