Ces derniers temps, j'ai été assez souvent dans un des Émirats pour y visiter l'Ami qu'il est convenu de nommer expatrié par profession. Cinq fois par jour, il sort de ses gonds (« Mais il va la fermer, sa grande gueule ! »), car dès 5 heures le muezzin appelle les fidèles à la prière et l'infidèle qu'il est, à la crise de nerfs. Il faut préciser que le malheureux a son logis coincé entre deux minarets qui y déversent leurs mégawatts exaltés (le vendredi, c'est le prêche entier). « J'y peux rien, ça me fait du bien. » (Il n'a pas tout à fait tort et je fais pareil ici lorsque, d'un coup de télécommande, je cloue le bec aux scies publicitaires (jingle) de Radio-Classique dont la niaiserie suffisante déchiquette impitoyablement une harmonie pourtant convenue et prédigérée.)

En vain je lui démontre que sa révolte est vaine, qu'il est l'hôte d'un pays qui lui fait (bien) gagner sa vie, etc. N'empêche, il a raison : quand bien même tous les autochtones seraient concernés - improbable vu le nombre limité de babouches devant les mosquées et la quantité exponentielle de larbins et d'esclaves importés d'Asie - il est aberrant au XXIe siècle qu'une religion impose une geignarde hégémonie qui, sans que rien ni personne n'y trouve à redire, morcelle chaque journée, sonorise l'espace, islamise le Temps... en tout cas s'obstine à martyriser indistinctement tous les tympans, surtout l'intelligence ! Il faudrait aussi parler de l'omniprésence en creux des normes islamiques : absence des femmes dans l'espace public, également des mendiants, des clebs, et ces mille tracasseries au moment du Ramadan que l'étranger a tout intérêt à respecter (malheur au fumeur et heureusement que sont invisibles les soupirs homophiles !). Bref, avec pas mal d'hypocrisie (à Dubaï alcool, putes, fric blanchi) l'Islam partout exhibe sa foi et dicte sa loi.



En France, il en va tout autrement. Le culte musulman est discret, les mollahs ne sont guère invités en commissions ou sur les plateaux TV pour gloser sur l'Éthique (on n'en dira pas autant des prétendus experts chrétiens !). Quant à la burqa, je trouve ce détail folklorique aussi inoffensif que le gréement des nonnes ou les turbans des sikhs. La pratique catho est, elle, plutôt décorative. Le dimanche à Garches, pour corser mon whisky, j'aime à mater la sortie de la grand messe : les cloches carillonnent, les bambins sont proprets dans le bleu marine et l'escogriffe en blanc fait de grand gestes en baisant in Christo toutes ses paroissiennes. Parfois, le mécréant qui somnole en moi se réveille : « Vous auriez dû chanter plus fort, votre Bon Dieu est sourd ! » Car c'était hier leur prière pour la Paix dans le monde.

En fait, ce n'est pas sur la place publique, mais bien dans les consciences - la mauvaise conscience - que le virus chrétien fait des ravages. Ayant pratiqué la confession du bon côté de la grille (là où le pouvoir spirituel absout), j'ai constaté effaré à quel point la culpabilité empoisonne, cadenasse, mutile, nourrie par un dualisme ancestral (l'âme/le corps, alors le sexe... pouah !). D'où une névrose catholique chronique, une sorte de pandémie fortement indurée au fil des siècles, une tare génétique consubstantielle au Dogme. Car comment gérer le formidable antihumanisme de la Révélation ? Si " Dieu " s'était contenté d'être YHWH, et Mahomet le prophète d'Allah, on laisserait volontiers chacun et chaque communauté régler ses comptes avec le surnaturel. Mais voilà, Jésus est passé par là : Dieu s'est fait homme. Ni plus ni moins. Zeus ou Allah, passe encore, mais un lardon du Père (pourquoi pas sa fille ?) ! Grotesque avatar. Fable intenable. D'où in fine cette désespérante duperie : ni plus ni moins que les autres religions mais d'une façon bien plus insidieuse, le christianisme n'aime pas l'humanité sauvée par l'Agneau immolé car la vraie patrie du pécheur est au Ciel : la voie royale pour y parvenir est le chemin de la croix et la haine de soi.

Holà ! me dira-t-on, pourquoi une telle rage ? Pourquoi mettre le feu à cette page ? Pourquoi ne pas choisir la voie médiane : être un sage agnostique. Impossible ! Face aux croyants qui savent, un devoir d'athéisme. Sur le même terrain, avec les mêmes armes. Non plus des cimeterres, mais les seuls mots qui scalpent les sophismes et pèlent les intégrismes. Agnostique ?!! 99% d'entre eux sont de mauvaise foi. Si je demande : « Crois-tu aux fées et à la licorne bleue ? », combien oseront répondre qu'ils suspendent leur jugement ? À peine 1% d'imbéciles. Les autres le sont aussi, pour le moins des lavettes, ces tièdes que vomissait Ieschoua. Car mon vénéré ex me donne encore raison : « Je suis venu apporter le glaive sur la terre et comme il me tarde que cette heure arrive ! »

Un dernier mot. Je n'ai pas mis le judaïsme de côté par désinvolture, encore moins par mépris mais parce que je ne pige toujours RIEN à cette religion. Entre victimologie et sionisme, authenticité et mauvaise foi, élection et malédiction, Tobie et lobby… la Terre promise est décidément trop minée. Donc je m'abstiens. Et je m'instruis : j'ai commencé La lamentation du prépuce. Drôle, caustique, pas autant que j'espérais. Même si l'auteur Shalom Auslander semble persuadé que YHWH a choisi les Juifs juste pour les emmerder – ce qui n'est pas pour me déplaire !


Ci-dessous, 3 dessins satiriques extraits de mon opus VOUS REPRENDREZ BIEN UN P'TIT APHORICUBE ? , M. Bellin/R. Boussard, Gap, 2006.











Possibilité d'admirer d'autres dessins du jeune et talentueux Romain Boussard, directement sur la plateforme de YOUSCRIBE (consultation gratuite, téléchargement complet payant) :