LETTRE 13ème

Chère confidente,
C'est sans aucun regret que j'ai quitté ce milieu brillant mais frivole. Il comblait ma vanité, non mon cœur. Je retournai donc à mon vrai milieu. J'avais perfectionné un tour de chansons et de poèmes grâce à mon accompagnateur, un compositeur de talent que j'avais surnommé Belette à cause de sa curiosité et d'une terrible myopie qui lui donnait un air fouineur. Il « tapait » au célèbre cabaret montmartrois LE LAPIN AGILE – comme jadis Eric Satie – et tenu par le non moins célèbre Frédé. Sur sa recommandation, j'avais pu y rôder mon numéro. Il était aussi pianiste d'ambiance dans un club « spécial » des Champs-Élysées. C'est là qu'il eut l'idée d'organiser une soirée en l'honneur de Francis Carco qu'il connaissait. La vedette devait en être Marie Dubas qui avait créé « Le doux caboulot ». Quant à moi, je récitais quelques vers du poète et lisais une scène de Jésus la Caille, la pièce qu'on venait de tirer de son roman.
Après la représentation qui s'était achevée sur des applaudissements nourris, Belette était allé papillonner de table en table tandis que je le remplaçais au piano. A un moment, il me fit signe de venir vers lui. Je plaquai un dernier accord et m'approchai. Il sablait le champagne en compagnie de Marie Dubas et de Francis Carco en personne, son épouse et un petit homme au physique de comique troupier.
- Asseyez-vous donc avec nous, jeune homme, et prenez un peu de champagne. Vous l'avez bien mérité car vous m'avez ému, ce qui n'est pas facile !
- Merci, Monsieur.
- Hein, il est bien le petit ? ajouta Marie.
Puis il me présenta à son entourage.
- Ma femme et Monsieur B*** à qui vous avez beaucoup plu, et il s'y connaît !
La soirée s'avançait, les clients commençaient à partir. Marie Dubas nous avait quittés la première et Belette avait rejoint son piano. Les Carco et leur ami se levèrent et, tandis que je les accompagnais jusqu'à la porte, monsieur B*** me tendit sa carte de visite avec un air canaille. C'est seulement à ce moment que je remarquai qu'il avait la bouche de travers ce qui, ajouté à une gouaille parisienne, en faisait un personnage fort pittoresque. Je rejoignis Belette.
- Alors, tu es content ? Tu l'as eu, ton petit succès !
- Oh ! oui, grâce à toi. Merci, merci…
Et je l'embrassai.
- A propos, que t'a dit Tonton ?
- Quel tonton ?
- Le monsieur qui était avec les Carco ! On le surnomme Tonton.
- Ah ! oui… il m'a donné sa carte de visite. Entre nous, il a l'air d'un vieux cochon !
- Tu es fou ! Ce « vieux cochon », comme tu dis, est un homme délicieux, célèbre dans le Tout-Paris. Il possède un des plus grands cabarets de la capitale où se produisent les vedettes du Music-Hall et que fréquente le monde entier. Tu vas me faire le plaisir de lui téléphoner, et vite !
Je promis. Mais en m'arrivant dans ma chambre, je trouvai sur la table de chevet un billet de ma mère me priant d'appeler Colette de toute urgence. Colette était une grande amie, une ancienne camarade de cours et l'une des plus jolies femmes que j'ai rencontrées. J'étais inquiet et, malgré l'heure tardive, je lui téléphonai. C'était en fait une bonne nouvelle : elle partait avec une compagnie pour une tournée internationale mais le jeune « premier » venait de rompre brutalement son contrat. Elle avait alors suggéré mon nom. Quelle chique fille ! Et c'est ainsi que le lendemain, après une courte audition, je signais le premier contrat sérieux à l'aube de ma carrière. Il devait m'emmener loin, très loin pour un voyage sublime.
Notre large répertoire avait pour titre « Aspects du Génie français ». Il allait des farces du Moyen-Age à Jean Cocteau (La Machine Infernale), ce qui me permit de rencontrer le Poète ainsi que Jean Marais. Quel souvenir ! Après 48 heures (!) de vol, je débarquai dans cette île chantée par Baudelaire et immortalisée par Bernardin de Saint-Pierre : Maurice. Bien qu'un peu nauséeux à cause de ce voyage interminable, je compris tout de suite que j'avais pénétré dans l'hémisphère austral comme le prétendait le certificat que le commandant de bord m'avait offert dans l'avion en m'arrosant de champagne. Une foule bigarrée et bruyante nous attendait sous un soleil aveuglant. Un ravissant petit indigène tout doré s'approcha de moi, m'offrant des fleurs.
- Bonjou… dis, monsieur, tu l'as vu, toi, la neige ?
Pas de doute, j'avais vraiment changé d'hémisphère : j'avais mis le pied dans l'Eden.
L'île Maurice appartenait aux Anglais depuis 1810, Napoléon leur ayant vendu l'île Bourbon. Aussi m'étais-je étonné d'avoir entendu ce petit bonhomme s'exprimer dans notre langue. Je devais d'ailleurs m'apercevoir par la suite que tous les Mauriciens parlaient la langue de Molière : les Anglais qui possédaient le pouvoir, les Indiens qui étaient les plus nombreux, les Chinois – tous commerçants – et enfin les Créoles dont le dialecte comporte beaucoup de termes français. Cette tour de Babel unifiée par la langue est un phénomène tout à fait extraordinaire.
A cette époque, Maurice n'était pas encore un réservoir à touristes. Le seul hôtel convenable se trouvait à Port-Louis et il était toujours plein. Aussi logea-t-on la troupe dans de charmants bungalows du plus pur style colonial. Le mien, que je partageais avec deux camarades, était ceint d'un vaste jardin débordant de fleurs exotiques, d'aloès et de citronniers. A gauche, un temple chinois ; à droite une maisonnette où une famille créole fabriquait de jolies poteries. Ce qui faisait dire à l'un de mes collègues à l'esprit caustique : « En somme, quand on sort de chez toi, soit on broie du noir soit on attrape la jaunisse ! « Ce bungalow était situé à Curepipe, mais le théâtre où nous nous produisions se trouvait à Rose-Hill. Ces noms enchantent encore ma mémoire !Peu d'artistes français venaient alors à l'île Maurice, ce qui aiguisait d'autant plus la curiosité de ses habitants. De plus, notre troupe s'enorgueillissait d'une sociétaire et d'un pensionnaire de la prestigieuse Comédie Française. Chacune de nos « premières » donnait donc lieu à une véritable soirée de gala où se pressait un parterre élégant de distillateurs de rhum et de riches planteurs de cannes à sucre. Tout ce qui venait de Paris passait pour un must, le summum du chic : on épiait nos moindres gestes, on copiait nos plus banales chemises !
Presque chaque soir, j'attendais mon amie Colette à la sortie du théâtre et nous allions souper, parfois en compagnie d'autres comédiennes. Mais depuis quelque temps, je les trouvais agitées ; elles minaudaient, souriaient en coin, se poussaient du coude d'un air entendu. Je demandai à Colette la cause de cette effervescence.
- Regarde, tu vois cette petite Austin-Martin qui stationne là-bas ?
- Je la vois. Et alors ?
- Elle est là presque chaque soir. Le chauffeur est un jeune homme qui démarre en trombe aussitôt qu'on approche.
- Curieux en effet. Faites attention, c'est peut-être un maniaque !
- Je ne crois pas. Je pencherais plutôt pour un admirateur timide.
- Encouragez-le !
- Oui, mais qui est l'heureuse élue ? That is the question.
- Décidément, ce pays est bien étrange. Tu te rappelles cet énorme bouquet que le gardien m'a apporté avant-hier, sans le moindre billet ?
- Si je m'en souviens ! C'est peut-être de lui !
Elle partit d'un grand rire.
- Viens donc, tu es folle !
Et nous allâmes dîner.
Rien de plus déconcertant pour un Européen que la saison des moussons. Le ciel est bleu, le soleil brille, rien ne bouge et tout à coup, c'est la nuit en plein jour. Un vent terrible, des trombes d'eau, ciel et terre se déchaînent ! En quelques secondes, les rues se transforment en torrents, les places en étangs boueux tandis que les jolis saris des Indiennes se fanent en piteuses serpillières. C'est ce qui arriva ce matin-là alors que je me hâtais vers le bureau de poste. Surpris par la tourmente tropicale, trempé en un clin d'œil, je me réfugie sous un énorme flamboyant. Une voiture passe, freine brutalement, recule puis stoppe à ma hauteur.
- Montez vite !
La portière était ouverte : sans réfléchir, je m'engouffre.
- Merci beaucoup… mais je vais inonder vos coussins…
- Aucune importance. Vous n'être pas habitué à notre climat, c'est très dangereux de rester sous un arbre par un temps pareil.
- J'ai été surpris !
- Où allez-vous ?
- A la poste.
- Ca tombe bien, moi aussi.
Et nous démarrons. C'est alors que, remis de mon émotion, je regarde mon chauffeur providentiel. Imagine, chère amie, un héros hollywoodien, un superbe athlète, svelte, bronzé, une dentition de neige, des yeux verts et une toison d'or mûrie au soleil des Tropiques. Sa chemise blanche rehaussait son teint halé et son short laissait entrevoir des cuisses musculeuses. Quel galbe ! Quelle apparition suffocante ! Sur-le-champ, je fus fasciné par une telle beauté, si parfaite, presque trop parfaite.
A la sortie du bureau de poste, il pleuvait toujours. Le garçon me proposa de me raccompagner chez moi.
- Je ne veux pas abuser…
- Je vous en prie !
- Alors, je vais vous indiquer le chemin.
- Inutile, je le connais. Vous habitez Curepipe, n'est-ce pas ?
J'étais soufflé.
- Je me présente : Gilles R***.
Et il me tend une main vigoureuse.
- Enchanté ! Et moi, c'est…
- Je sais. Je vous connais. Je suis un abonné du théâtre de Rose-Hill, j'y viens presque chaque soir et je suis un de vos admirateurs. Il y a longtemps que j'espérais faire votre connaissance… pour vous dire combien j'admire votre talent et votre élégance parisienne.
Je demeurais embarrassé comme une débutante au Bal des Petits Lits Blancs ! Par bonheur, nous étions arrivés chez moi.
- Mille fois merci ! Voulez-vous entrer prendre un café ?
- Non, merci. Je suis très pressé. Mais nous pourrions peut-être nous revoir ce soir ? Je sais que vous allez interpréter Almaviva du Barbier de Séville. Bien sûr, je serai dans la salle. Eh ! bien, après la représentation, acceptez-vous de souper avec moi ? Nous irons dans un restaurant amusant où tout Maurice aime à se retrouver. D'accord ?
- D'accord.Et nous nous séparâmes.

Je n'aimais pas jouer les jeunes premiers, sauf le rôle d'Almaviva. Son insolence aristocratique me plaisait ainsi que l'humour de ses métamorphoses. Enfin, il y avait la fameuse sérénade à chanter, ce qui constituait un plus pour moi. Et Colette était une si délicieuse Rosine ! Ce soir-là, la représentation fut un triomphe. A la sortie du spectacle, un public nombreux nous attendait pour le rituel immuable des autographes… et la petite Austin verte patientait aussi, mais cette fois portières grandes ouvertes sous les yeux de mes amies médusées, un brin dépitées lorsque ce fut moi, l'heureux élu, qui montai dans le carrosse du Prince Charmant. Pour moi commençait alors une aventure amoureuse à la Barbara Catland… en moins convenable, pardon Madame !
La route était déserte, totalement obscure. Seuls les phares éclairaient les troncs des baobabs et des palmiers, de sorte que j'avais l'impression d'être emporté entre les colonnades d'un interminable temple. Parfois, au détour d'un virage, les bras immenses d'un flamboyant griffaient la nuit.
Le restaurant chinois s'appelait Gropiti. Pas très chic, mais il offrait une cuisine raffinée. L'établissement était complet. Quelques convives, des spectateurs sans doute, me reconnurent et m'applaudirent. Délicieux frisson et ambiance d'entrée garantie. Je compris tout de suite que mon nouvel ami était un familier des lieux à la manière dont nous fûmes tous deux accueillis. On nous avait réservé un « salon » particulier, c'est-à-dire une sorte de case en bambou nichée sur une terrasse. Un jeune Chinois à la grâce ambiguë nous servit. Cette atmosphère étrange, la touffeur de la nuit, les mets épicés, un excellent whisky encouragèrent Gilles à me faire une véritable déclaration d'amour. Je commençais à être sérieusement excité lorsque, délicatement, il mit dans ma main un paquet enrubanné.
- C'est pour vous ! murmura-t-il simplement.
Je l'ouvris : quelle splendide montre en or ! C'était trop pour mes complexes, je refusai… Désolé, mon amoureux se faisait pressant.
- Elle ne vous plaît pas ?
- Mais si, voyons, mais je ne peux accepter un tel présent !
- Tu le mérites. Vraiment.
Très ému, je mis la montre à mon poignet. Ce bijou scellait notre rencontre. Ce fut une nuit chaude et parfumée. Gilles était un amant délicat et je ne me lassais pas de caresser ce corps sculptural. Bien entendu – je l'avais deviné – c'était lui qui m'avait fait livrer le fameux bouquet !
Nous retournions souvent chez Gropiti, notre nid d'hirondelle, pardon, notre nid d'amour ! Un soir, après souper, il m'entraîna dans une maison toute proche. Une porte de bois massive, un judas sévère. Gilles heurte discrètement. Un vieux chinois entrebâille la porte en s'inclinant bien bas avec cérémonie. Nous entrons et il nous guide vers une vaste pièce obscurcie par une fumée bleuâtre. Par terre, des lits de pierre agrémentés de coussins de soie, des silhouettes allongées dans la pénombre. Une fumerie d'opium ! Je m'attendais à une banale salle de hammam et j'étais médusé. Nous nous allongeâmes et l'on nous prépara deux petites pipes grésillantes. Je n'éprouvai aucune jouissance particulière, juste un vague endormissement. Je n'ai d'ailleurs jamais renouvelé l'expérience. Gilles avait voulu m'étonner ; il n'était pas accro non plus, c'était juste par snobisme car il appartenait à la jet-set locale.
J'ai passé bien des nuits en sa compagnie dans cette société raffinée de Maurice, cultivée, décadente, qui sentait venir la fin de ses privilèges et qui s'étourdissait pour oublier, s'enivrant au son des rengaines de Piaf auprès de somptueuses piscines ou près de feux de bois de santal. Quant à moi, cet amour tropical m'avait donné des goûts de midinette ! J'aimais aller me promener avec mon bel amant dans le célèbre Jardin des Pamplemousses, pour admirer les nénuphars et les tortues géantes ou rêver, tendrement enlacés devant le faux tombeau de Paul et Virginie que Bernardin de Saint-Pierre avait faits mourir sur les bords de cette île si romantique. Je me sentais romanesque à mon tour même si, d'une façon générale, Gilles se montrait discret sur notre liaison car il était sous-officier de la marine britannique. C'est ainsi qu'un jour, devant remplacer son commandant, il m'invita sur son bateau et me présenta comme son cousin à un équipage très « sympathique ». Nous allâmes ensuite visiter les îles Seychelles.
Merveilleuses Seychelles ! Paradis turquoise ! Oui, c'était l'Eden originel. Parfois le soir, nous quittions discrètement notre cabine pour aller dormir sur le sable blanc après que le soleil a jeté son ultime rayon vert juste avant de sombrer dans une mer en sang. Tu liras plus loin, ma bonne amie, le modeste poème que j'ai écrit à chaud, si je puis dire.
Hélas ! les plus douces romances ont une fin : mon contrat arrivait à son terme et je devais quitter Maurice pour d'autres cieux. Nos étreintes redoublaient, ses promesses aussi, Gilles n'ayant que cette phrase à la bouche : « Bientôt, très bientôt, je serai à Paris avec toi ! » Je mettais cette ardeur sur le compte de nos adieux fiévreux, simples mots de consolation, pensais-je. Lui, non. Il ne se berçait pas d'illusion : il caressait une promesse.
Mon voyage s'acheva quelques semaines plus tard et c'est avec émotion que je retrouvai mon Paris et mes petits parents. J'en oubliai un peu Gilles et notre oasis enchantée, lui non : il ne parvenait pas à m'oublier. La preuve : une liasse de lettres m'attendait, m'annonçant son arrivée imminente et toutes signées « Bamby « . (Encore ce surnom, quelle manie !) Chaque fois que je recevais ce genre de missive, je suppliais Gilles de ne pas venir. Je lui écrivais que si chez lui, à Maurice, « tout est luxe, calme et volupté » comme l'a chanté Baudelaire, ici, à St Maurice, dans ma banlieue parisienne, tout est gris, lutte et médiocrité. L'ombre après la lumière et sous l'or : la boue. Que mon ange immaculé n'y pose pas le pied ! Peine perdue. J'avais beau dissuader mon amant, rien n'y fit. Un beau matin, il débarque sans crier gare, son taxi croulant sous ses bagages griffés Lancel. Quelle apparition ! Quel choc ! Mais une fois passée l'ivresse des retrouvailles, ce fut le déclin : mon beau marin s'étiolait. Très vite, lui si sportif, il maigrit, pâlit et prit un air de faon égaré. Comment aurais-je pu lui offrir le dixième du luxe auquel il était habitué ? Il tenta alors de devenir mannequin, en vain. Même un séjour à Cannes ne parvint pas à lui rendre son sourire radieux. Il tomba malade pour de bon et se résigna à repartir pour son île lointaine. C'était un objet trop précieux, trop délicat, je n'avais pas pu le préserver. Je n'avais pas su l'aider, je n'avais pas su l'aimer ! Etais-je capable d'aimer ? (n'est-ce pas, monsieur Freud !) Je ne l'ai jamais retrouvé malgré des recherches diligentées par une amie. Mais avait-elle vraiment cherché ? Pourquoi faut-il donc que les êtres précieux disparaissent avant même qu'on ait le temps de les connaître à fond ? Restent les souvenirs, les clichés jaunis… mais pourquoi les souvenirs ne restituent-ils jamais la vérité, pourquoi les photos surannées pétrifient-elles l'inaccessible Beauté ? Miraculeuses icônes néanmoins : c'est tout ce qui me reste de mes amours de jeunesse, ainsi qu'un coquillage de nacre. Quand je me sens trop seul, je le porte à mon oreille… et j'entends le ronronnement de l'océan, le chant du vent dans les filaos. Alors, quand bien même je ferme les yeux, apparaît dans ma mémoire éblouie son lumineux visage, sa grâce parfaite, ô mon Kouros des Tropiques !


A Gilles R***

Allons ! Allons cacher
nos amours défendues
sous les filaos gémissants !
Et que nos doigts s'étreignent,
maillons de chaîne humaine
sous un ciel complaisant…
La mer, tam-tam mouvant,
nous marquera le temps
de ses vagues inachevées.
T'arrachant à mes bras,
parfois tu plongeras
dans les flots irradiants
vers les abysses rouges
et les poissons dorés,
jardin multicolore
que la houle laboure.
Et moi, pendant ce temps,
j'égrainerai le sable,
le sable incandescent :
mon rosaire d'amour !
Et quand tu sortiras,
offert et ruisselant,
pour mon baptême de chair
je lécherai le sel
de ton corps consentant.
Je sculpterai tes reins,
coussin de mes paresses,
je sculpterai ton dos,
rempart à mes faiblesses,
je sculpterai ton sexe,
totem de mes désirs,
avec ma bouche avide
et mes mains éblouies.