Comment se montrer solidaire du Tibet sans enfreindre la Charte olympique ? Les athlètes français ont décidé d'arborer un badge portant la mention : « POUR UN MONDE MEILLEUR. » Au grand soulagement du secrétaire d'Etat aux sports, Bernard Laporte, qui voit « un geste fort » car « le message est net ».
Il est, en effet, d'une netteté éclatante. Et même affolante, par son extrême précision. « Pour un monde meilleur » a le mérite d'être plus concis que « Continuons tous ensemble à œuvrer résolument pour le bien de nos peuples. » Et moins sec que « Libérez le Tibet ».
Ce badge est lourd à porter. Fallait-il employer des mots aussi percutants ? Rien n'est plus grand que le monde. A elle seule, la Chine nous écrase. Et que dire de l'adjectif « meilleur », qui suggère un monde encore plus beau, encore plus juste et plus libre ? Mais le comble est atteint avec « pour ». A-t-on bien mesuré le poids de cette préposition ? Etre pour, c'est ne pas être contre (le meilleur des mondes). Nous irons à Pékin, avec le badge bien en évidence sur la poitrine. Pour le meilleur et pour le pire.

Robert Solé, LE MONDE du mardi 8 avril 2008