Quelques semaines avant que la plupart des arbres ne fassent leur traditionnel strip-tease, voilà revenue la période des bonnes feuilles, rentrée littéraire oblige. J'y souscrits bien volontiers pour mon nouvel ebook "L@MOUR TEXTO" (à paraître sur Amazon.fr le 5 septembre prochain). Autant dire qu'après mes Amants des praz, je n'ai guère chômé cette année. Vite, quelques brassées de ce nouvel opus où la pure Mado fait place au sémillant et roué Omar, champion toutes catégories du sms... s@imes, comme il se doit !

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Printemps 2013.

Quelque part sur Internet.

Un site de rencontres gay.

Là où l’on s’observe en chiens de faïence, histoire de meubler sa solitude et de s’offrir des fantasmes à l’œil.

Deux profils parmi des milliers.

Amorce de contact un lundi soir.

Chaque mec a affiché son pseudo, son âge, l’objet de sa quête.

L’un (32 ans) est évasif, peut-être circonspect, en tout cas économe de mots : « Cherche duo sensuel. »

L’autre (65), qui en dit davantage sur lui-même (photos comprises), est plus prolixe voire alambiqué : « Cherche duo sensuel (voire +) et très tendre à base de massages – par mes soins – et de musique relaxante pour (jeune) homme cool et non claustro (sur ma mezzanine-cocon). »

Pourtant, deux mots identiques ont fait mouche.

C’est l’internaute le plus mûr et le plus bavard qui s’engouffre dans la brèche, passe à l’attaque.



 Ton duo, c’est flûte et harpe ou piano-violoncelle ?

 piano 4 mains

 Veux-tu que nous fassions quelques gammes ensemble ?

 oui ds lecons avec toi lol @ tt Kissssssss

Aussitôt le site est abandonné au profit des seuls SMS. Se poursuit un dialogue serré entre Julius et Omar. (Oscar aussi, très présent dans le décor). Un remake de Jules et Jim ? Rien à voir. N’empêche, un singulier duo-trio.



Julius est un écrivain sexagénaire qui s’ennuie ferme. Omar un jeune Marocain cultivé inscrit à Pôle Emploi. Quant à Oscar qui vit au loin et n’a rien vu venir, ami officiel et officieux “mari”, il a la mer pour maîtresse. Il pousse son légendaire snobisme à se passer de portable tandis que les deux amants frétillent des quatre pouces sur l’écran magique : quand l’un cisèle son émoi par le style, le second par jeu le cisaille. (Silence goguenard du troisième !). Ainsi, de fin mai à fin août, un triathlon. Une oasis aussi. Surtout un tsunami : plusieurs centaines de textos en quelques semaines, par rafales nuit et jour, surtout à l’aube.

S@imeS ou SOS ?

Une cour assidue en duo-duel qui remplace billets doux et bouquets de violettes.

Dans l’attente du texto décisif.

Définitif ?



Quand l’un l’espère, l’autre diffère.

Dans l’intervalle, sans répit, les sms crépitent - échange non-stop où chacun affûte ses armes : subjonctif, citations, trémas et cédilles pour l’un des champions ; pour l’autre, abréviations, fusions phonétiques, rébus typographiques. Écriture sélective contre saisie intuitive. Mais qu’importe la perfection formelle à l’ère des messages électroniques ! Seule la passion et sa réactivité. Seule l’issue tant convoitée, tant redoutée : rupture ou happy-end ? Avec au fil des jours cette certitude mineure mais absolue : sur la carte du Tendre francilienne, le plus grand adversaire des amants, c’est le RER où un retard indéterminé est sans cesse annoncé entre les stations Nouvelle-Amitié et Tendre-sur-Estime !

Ainsi, plus que jamais, l’auteur s’est pris aux mots pour son 22ème ouvrage en incarnant sa devise : « Écrire ma vie, vivre mon écriture. »

Reprendre aussi sa vieille vie, la vie d’avant, comme on ravaude un tissu déchiré.

Comme on poursuit inlassablement une idylle mort-née.

C’était durant l’été 1996.

Tanger là-bas, inaccessible…

Tanger aujourd’hui.

En Ile-de-France.

Ici, tout de suite.

L’Amour à tout prix !


à suivre